Chapitre 5 — L’économie contre la compassion

Dans toute cette affaire, il existe un non-dit monumental : l’argent.

Car accompagner dignement une fin de vie coûte cher :

  • Soins palliatifs spécialisés.
  • Soutien psychologique et spirituel.
  • Accompagnement familial.
  • Déplacements des équipes mobiles.
  • Hospitalisation à domicile.

Tout cela demande des budgets conséquents, sur plusieurs semaines, parfois plusieurs mois.

À l’inverse, l’acte d’euthanasie est :

  • Rapide.
  • Peu coûteux.
  • Administrativement simple.

Un médecin, une ordonnance, une injection. La logistique est minimale. Le coût pour la collectivité est marginal.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Selon plusieurs études économiques :

  • Le coût moyen d’un accompagnement en soins palliatifs en France est d’environ 8 000 à 12 000 euros par patient.
  • Le coût moyen d’un suicide assisté, dans les pays où il est pratiqué, oscille entre 800 et 1 500 euros.

Dix fois moins cher.
Dix fois plus rapide.
Dix fois plus « efficace », diraient certains technocrates.

Dans un système hospitalier au bord de l’effondrement, où l’on cherche déjà à rogner sur tout — durée d’hospitalisation, traitements coûteux, actes non rentables — l’euthanasie deviendra tôt ou tard un réflexe économique.

Pas par méchanceté.
Pas par idéologie.
Mais par nécessité budgétaire.

Et c’est là que réside le piège mortel. Si l’argent décide, la compassion disparaît. Si le coût dicte la fin de vie, la dignité humaine devient une variable d’ajustement.

On laissera alors croire au grand public qu’il fait un choix « libre », alors qu’en coulisses, les équations comptables auront déjà tranché. Certaines mutuelles oeuvrent dans ce sens en démarchant les députés sans complexe (1).

Un exemple concret :

Dans un service de soins palliatifs du sud de la France, une infirmière :

« Parfois, on est tentés de dire à un patient très dépendant : « Vous savez, il existe d’autres options… » Parce qu’on n’a plus les bras, plus les lits, plus le temps. »

Elle-même en pleurait.
Non pas parce qu’elle manquait de compassion.
Mais parce qu’on l’avait laissée seule, sans moyens, face à des détresses immenses.

Tant que les soins palliatifs resteront un luxe, l’euthanasie sera pour les plus démunis ce que l’incarcération est pour les marginalisés : une solution expéditive qui masque notre incapacité collective à accompagner les plus vulnérables jusqu’au bout.

Notes :

 La Mutuelle générale de l’Éducation nationale (MGEN) démarche les députés pour repousser les limites de loi sur l’aide à mourir.[…] Dans son courrier, que Le Figaro a consulté, elle préconise d’élargir les conditions d’accès au suicide assisté et à l’euthanasie au travers de quinze amendements prêts à l’emploi. – Le Figaro 11 avril 2025https://www.lefigaro.fr/actualite-france/nous-accompagnons-nos-assures-de-leur-premier-a-leur-dernier-souffle-ces-amendements-proposes-par-une-mutuelle-pour-elargir-l-acces-a-l-aide-a-mourir-20250411